Je sais
que je ne sais rien
"Avoir
la gnose, déclarent d'un commun accord l'extrait 78 de Théodote, Marcos chez
Irénée, le IVème Traité du Corpus Hermétiste, c'est connaître ce que nous
sommes, d'où nous venons et où nous allons, ce par quoi nous sommes sauvés,
quelle est notre naissance et quelle est notre renaissance."
Henri-Charles
Puech
«En quête de la gnose" (tome I, pages
165-166)
« Connais-toi toi-même, Temet nosce, Gnothi seauton. »
Je sais que je ne sais rien. Il faut
sans cesse se répéter cet adage pour pouvoir se rendre compte que la véritable
connaissance, profonde et authentique, celle qui va nous révéler réellement à
nous même, ne s’acquiert pas de façon spontanée et mécanique mais demande un
effort de volonté et de concentration soutenu.
A défaut, nous serons toujours dans le
superficiel et l’illusoire qui bercent régulièrement notre vie quotidienne,
selon le bon plaisir de notre ego, conditionné par nos sens, nos émotions, nos
plaisirs et nos besoins.
Pourquoi est-ce si difficile
d’appliquer notre mode de connaissance à notre nature spirituelle et que
faut-il faire pour passer du registre du savoir à celui de la connaissance
existentielle ?
Ce n’est pas facile de l’expliquer
rationnellement. Tout est une question de regard.
Prenons un exemple concret : vous
êtes spectateur d’une pièce de théâtre ; les comédiens jouent leur rôle et
vous analysez les personnages en présence, l’action qui se déroule, la qualité
des décors et le talent des acteurs ; vous êtes dans l’illusion théâtrale,
ce qui est tout-à-fait normal, puisqu’il s’agit d’un divertissement. Cela
correspond à la vie quotidienne et à notre façon d’appréhender tout ce qui se
passe autour de nous.
Pour changer de registre de
connaissance, il faut changer de regard et, au lieu de vous limiter au
spectacle de ce qui vous entoure, chercher à comprendre quel sens le dramaturge
a voulu donner à sa pièce de théâtre, pourquoi il l’a écrite et dans quel but
s’est-il donné cette peine.
La démarche n’a plus rien à voir avec
l’autre façon d’appréhender les choses ordinaires de la vie ; vous êtes à
la recherche d’un sens, d’une valeur qui dépasse les apparences et les anime en
dévoilant leur raison essentielle d’exister. Et de ce fait vous entrez en
contact avec le monde de l’essence en lieu et place de l’univers de la
manifestation ; vous touchez du doigt le secret de l’existence même de tout
être.
Ce n'est pas la forme extérieure qui est existentielle, mais l'essence qui
génère et exprime cette extériorité ; et pour arriver à la saisir et à la
comprendre il faut aller la débusquer. A ce moment-là nous acquérons un statut
d’être spirituel qui nous ouvre les portes des dimensions supérieures ;
nous ne sommes plus la marionnette et nous devenons progressivement le
marionnettiste, en nous rapprochant de l’énergie créatrice. Et nous devenons existentialistes, au vrai
sens du terme, celui qui place l'homme au centre de sa réflexion et qui considère que l'homme
seul peut décider du sens qu'il va donner à son existence, à condition d’en
découvrir son essence spirituelle en dehors de tout conditionnement extérieur,
qu’il soit social, philosophique ou religieux.
"Et
les hommes, que penseront-ils de moi, dont ils avaient une opinion si élevée,
quand ils apprendront les errements de ma conduite, la démarche hésitante de ma
sandale, dans les labyrinthes boueux de la matière, et la direction de ma route
ténébreuse à travers les eaux stagnantes et les humides joncs de la mare où,
recouvert de brouillards, bleuit et mugit le crime à la patte sombre !… Je
m'aperçois qu'il faut que je travaille beaucoup à ma réhabilitation, dans
l'avenir, afin de reconquérir leur estime. Je suis le Grand-Tout ; et
cependant, par un côté, je reste inférieur aux hommes, que j'ai créés avec un
peu de sable !"
Lautréamont
"Les
chants de Maldoror" (chant troisième)
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