mercredi 10 décembre 2008

Ainsi parlait Proust


Valentin Louis Georges Eugène Marcel Proust, né le 10 juillet 1871 à Auteuil et mort le 18 novembre 1922 à Paris, était un écrivain français dont l'œuvre principale s'intitule À la recherche du temps perdu.
Des critiques ont écrit que le roman moderne commençait avec Marcel Proust. En rompant avec la notion d’intrigue, l’écrivain devient celui qui cherche à rendre la vérité de l’âme. La composition de La Recherche en témoigne : les thèmes tournent selon un plan musical et un jeu de correspondances qui s’apparentent à la poésie. Proust voulait saisir la vie en mouvement, sans autre ordre que celui des fluctuations de la mémoire affective. Il nous laisse des portraits uniques, des lieux recréés, une réflexion sur l’amour et la jalousie, une image de la vie, du vide de l'existence, et de l’art. Il nous laisse surtout un style composé de phrases (parfois) longues, pareilles à une respiration dans laquelle on « s’embarque ».


On n’aime que ce qu’on ne possède pas tout entier

C'est toujours l'attachement à l'objet qui amène la mort du possesseur.

L'être que je serai après la mort n'a pas plus de raisons de se souvenir de l'homme que je suis depuis ma naissance que ce dernier ne se souvient de ce que j'ai été avant elle.

Je trouve très raisonnable la croyance celtique que les âmes de ceux que nous avons perdus sont captives dans quelque être inférieur, dans une bête, un végétal, une chose inanimée, perdues en effet pour nous jusqu'au jour, qui pour beaucoup ne vient jamais, où nous nous trouvons passer près de l'arbre, entrer en possession de l'objet qui est leur prison. Alors elles tressaillent, nous appellent, et sitôt que nous les avons reconnues l'enchantement est brisé. Délivrées par nous, elles ont vaincu la mort et reviennent vivre avec nous

La vie pouvait-elle me consoler de l'art ? y avait-il dans l'art une réalité plus profonde où notre personnalité véritable trouve une expression que ne lui donnent pas les actions de la vie ?

La nature ne semble guère capable de donner que des maladies assez courtes. Mais la médecine s'est annexé l'art de les prolonger.

Que de bonheurs possibles dont on sacrifie ainsi la réalisation à l'impatience d'un plaisir immédiat.

Je sentais que la recherche du bonheur dans la satisfaction du désir moral était aussi naïve que l'entreprise d'atteindre l'horizon en marchant devant soi. Plus le désir avance, plus la possession véritable s'éloigne. De sorte que si le bonheur, ou du moins l'absence de souffrances, peut être trouvé, ce n'est pas la satisfaction, mais la réduction progressive, l'extinction finale du désir qu'il faut chercher. On cherche à voir ce qu'on aime, on devrait chercher à ne pas le voir, l'oubli seul finit par amener l'extinction du désir.

L'influence anesthésique de l'habitude ayant cessé, je me mettais à penser, à sentir, choses si tristes.

Les liens entre un être et nous n'existent que dans notre pensée. La mémoire en s'affaiblissant les relâche, et, malgré l'illusion dont nous voudrions être dupes et dont, par amour, par amitié, par politesse, par respect humain, par devoir, nous dupons les autres, nous existons seuls. L'homme est l'être qui ne peut sortir de soi, qui ne connaît les autres qu'en soi, et, en disant le contraire, ment.

C'est seulement par la pensée qu'on possède les choses, et on ne possède
pas un tableau parce qu'on l'a dans sa salle à manger si on ne sait pas le comprendre, ni un pays parce qu'on y réside sans même le regarder.

J'étais effrayé pourtant de penser que ce rêve avait eu la netteté de la connaissance. La connaissance aurait-elle, réciproquement, l'irréalité du rêve?
L'amour, même en ses plus humbles commencements, est un exemple frappant du peu qu'est la réalité pour nous.
La force qui fait le plus de fois le tour de la terre en une seconde, ce n'est pas l'électricité, c'est la douleur.
C'est sans doute l'existence de notre corps, semblable pour nous à un vase où notre spiritualité serait enclose, qui nous induit à supposer que tous nos biens intérieurs, nos joies passées, toutes nos douleurs sont perpétuellement en notre possession.
Sans doute peu de personnes comprennent le caractère purement subjectif du phénomène qu'est l'amour, et la sorte de création que c'est d'une personne supplémentaire, distincte de celle qui porte le même nom dans le monde, et dont la plupart des éléments sont tirés de nous-mêmes.
L'expérience aurait dû m'apprendre - si elle apprenait jamais rien - qu'aimer est un mauvais sort comme ceux qu'il y a dans les contes, contre quoi on ne peut rien jusqu'à ce que l'enchantement ait cessé.
La permanence et la durée ne sont promises à rien, pas même à la douleur.
Le bonheur est dans l'amour un état anormal.
Jamais Noé ne put si bien voir le monde que de l'arche malgré qu'elle fut close et qu'il fit nuit sur la terre.
Nos désirs vont s'interférant et, dans la confusion de l'existence, il est rare qu'un bonheur vienne justement se poser sur le désir qui l'avait réclamé.

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