mercredi 29 mars 2017

Ainsi parle Joël de Rosnay

Joël de Rosnay


« Nous sommes à la veille d’une mutation de l’espèce humaine.»
« Je crois que la spiritualité est l’un des plus grands accomplissements de la vie. La spiritualité a été trop longtemps associée à la religion. Pour moi, le grand mystère est l’unité de la nature, l’un des thèmes de mon prochain livre. Et dieu dans tout ça ? Je m’interroge sur la relation entre le Big Bang et le point Omega de Pierre Teilhard de Chardin qui pensait que la matérialité allait se transformer en spiritualité, en un « esprit pur » qui serait créé par tous les hommes au cours du temps. Ce qui m’intéresse, c’est ce qui se situe entre les deux : le temps. Qu’est-ce qui crée le temps ? En acquérant de l’information, les hommes créent de l’entropie, du désordre, mais « investissent » dans un « capital temps » qu’ils transmettent aux autres. Si l’on contracte le temps, le Big Bang et le point Omega se confondent. En d’autres termes, une explosion d’énergie peut être fusionnée avec une implosion d’esprit. Un instant d’une prodigieuse intensité peut devenir l’éternité… »
Extrait de « Surfer la vie », éditions Les Liens qui Libèrent
« Arrivé à un stade de ma vie et de mon expérience qui m’engage à prendre un certain recul, je voudrais témoigner dans ce livre d’un certain sentiment de spiritualité, qui a émergé de mes recherches pour comprendre l’ordre caché des choses et le sens secret de la nature. Ce sentiment est né d’un émerveillement et d’une révélation sur la simplicité des codes naturels qui conduisent au jaillissement, dans l’espace et dans le temps, de formes d’une extrême diversité et d’une grande beauté.
Je parle en effet de spiritualité et d’émerveillement, deux mots étranges pour un vulgarisateur scientifique. Mais je ne suis pas le premier à être émerveillé par l’unité et l’harmonie de la nature… Einstein, Spinoza, Pythagore ou encore Jacques Monod l’ont été avant moi. Lorsqu’on observe cette perfection, on ne peut que se demander ce qu’il y a derrière. On dirait que tout a été fait pour aboutir à cette harmonie. Pour beaucoup, la réponse à cette question est « Dieu ». Mais je ne suis pas dans une approche religieuse, du rite, du dogme. Néanmoins, comme mes amis Hubert Reeves et Yves Coppens, je m’interroge sur cette forme d’organisation inexpliquée qui pose question. Le scientifique que je suis avoue ne pas connaître la réponse. C’est un « mystère inexplicable, mais présent ». Dans mon livre, je fais référence à la tapisserie de la licorne. La plupart des gens ne voient que le résultat, sublime. Mais les scientifiques ou les philosophes vont voir derrière la tapisserie pour essayer d’interpréter les motifs. Je ressens un sentiment de spiritualité laïque, émergeant de l’unité, qui m’incite à donner du sens à ma vie et à transmettre. »
Extrait de  « Je cherche à comprendre… Les codes cachés de la nature » de Joël de Rosnay, éditions « Les liens qui libèrent »


lundi 6 mars 2017

"Le désespéré" de Gustave Courbet

Gustave Courbet
(1819-1877)


Le désespéré
(1844-1845)

Chef de file du mouvement du Réalisme en peinture, Gustave Courbet (1819-1877) affirmait souvent qu’il ne souhaitait peindre que ce que ses yeux pouvaient voir, rejetant ainsi avec un certain esprit provocateur le Romantisme dominant ainsi que les normes académiques encore en vigueur. Artiste indépendant, contestataire et prônant la représentation de la réalité crue, son influence fut déterminante sur la génération des Impressionnistes et des précurseurs du Cubisme. Innovateur, ses travaux marquèrent durablement son temps, en élisant comme sujets des thématiques sociales, décrivant la vie des petites gens ou le quotidien des artistes parisiens.



Le Désespéré est un des autoportraits les plus célèbres de l'artiste français peint vers 1845 (45 x 54cm) alors qu'il avait 25 ans. C'est probablement le tableau le plus singulier et le plus mystérieux de la série des autoportraits de jeunesse de Gustave Courbet. Dans "Le Désespéré" Courbet s’attache à représenter un personnage en proie à la détresse, avec une expression saisissante proche de la folie. La saisie de l'expression est très réaliste et frappante: Ses yeux sont écarquillés et égarés, ses narines dilatées, sa bouche entr’ouverte, ses bras déployés dans une posture dramatique prêt à s'arracher les cheveux, etc.
 On a l'impression que son visage va se projeter hors de la toile.


"Le peintre  se représente lui-même de face et peint son tableau uniquement avec des couleurs ternes. Le regard est la partie du tableau qui interpelle et qui fascine : il est lointain, le cercle blanc des yeux écarquillés en accentue l'effet et intrigue le spectateur. Tout autour de ce regard s'organisent les autres composantes du dessin pour insister sur ce mal-être, le front plissé indique la gravité du souci. Cette partie du visage, la plus éclairée,  comme son attitude, une main posée sur sa tête et l'autre appuyée sur sa tempe, renforce l'impression de profonde inquiétude..."

(d'après la page internet des étudiants en première L du lycée Joffre de Montpellier)


El desdichado

Je suis le Ténébreux, - le Veuf, - l'Inconsolé,
Le Prince d'Aquitaine à la Tour abolie :
Ma seule Etoile est morte, - et mon luth constellé
Porte le Soleil noir de la Mélancolie.

Dans la nuit du Tombeau, Toi qui m'as consolé,
Rends-moi le Pausilippe et la mer d'Italie,
La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé,
Et la treille où le Pampre à la Rose s'allie.

Suis-je Amour ou Phébus ?... Lusignan ou Biron ?
Mon front est rouge encor du baiser de la Reine ;
J'ai rêvé dans la Grotte où nage la sirène...

Et j'ai deux fois vainqueur traversé l'Achéron :
Modulant tour à tour sur la lyre d'Orphée
Les soupirs de la Sainte et les cris de la Fée.

Gérard de Nerval


« … Je suis absolument perdu. Je suis même à l’agonie. J’ai un ramollissement du cerveau venu des lavages que j’ai faits avec de l’eau salée dans mes fosses nasales. Il s’est produit dans le cerveau une fermentation de sel et toutes les nuits mon cerveau me coule par le nez et la bouche en une pâte gluante. C’est la mort imminente et je suis fou ! Ma tête bat la campagne. Adieu ami vous ne me reverrez pas !… »

Dans la nuit du 1er janvier au 2 janvier 1892, il fait une tentative de suicide au pistolet. Il casse alors une vitre et tente de s’ouvrir la gorge. On l’interne à Paris le 8 janvier dans la clinique du docteur Émile Blanche, où il meurt de paralysie générale, le 6 Juillet.
Guy de Maupassant