mardi 24 août 2021

Naufrage

 

Claude Joseph Vernet - 1763 


Naufrage

"Les bateaux ne coulent pas à cause de l'eau autour d'eux.

Ils coulent à cause de l'eau qui rentre à l'intérieur.

Ne laissez pas les événements qui surviennent autour de vous pénétrer votre esprit et vous faire couler."

Auteur inconnu

Quand tout s’agite autour de nous, quand nous nous sentons mis à mal par des circonstances menaçantes pour notre intégrité physique et psychique, il faut impérativement faire face et comprendre ce qui se passe si nous voulons rester maître de la situation et continuer de tenir la barre dans la tempête pour éviter le naufrage.

Il faut adopter et appliquer la devise « Fluctuat nec mergitur » pour continuer à flotter sans être submergé.

C’est d’autant plus difficile de faire face quand l’on perçoit que la majorité des gens autour de nous perdent pied et se laissent emporter par les vagues. Pourquoi cette perte de repères nous ébranle-t-elle autant, au point de nous égarer ?

La singularité de l’homme, qui en fait toute sa richesse,est en train de disparaître, à savoir ses capacités à réfléchir, à s'interroger sur son origine, sa place dans cet univers, sur l'esprit, le sens de la vie, la mort ou le sacré.

Quelque part au fond de nous, nous ressentons que nous approchons d'une fin de cycle, sans bien comprendre ce que cela signifie mais en prenant conscience que nous approchons progressivement d’un point de rupture dans notre civilisation, une rupture se situant à plusieurs niveaux, économique, social, financier, écologique, démographique, et démocratique.

Il ne faut pas céder à la tentation de l’abandon sous peine d’être aspiré par un vide spirituel dangereux. Un sentiment d’impuissance s’installe sans doute du à la perte du sacré et au dédain des traditions dans nos sociétés modernes essentiellement matérialistes.

Résister pour exister, c’est le secret de la réussite dans la vie spirituelle.

Plier l’échine, accepter le joug et se soumettre ne sont que les symptômes d’une vie ordinaire sur laquelle l’esprit n’aura jamais soufflé.

Il y a des langues où il n'y a pas de mot pour désigner l'avenir, peut-être parce qu’ils vivent dans un éternel présent, sans se poser de questions sur leurs lendemains. Peut-être n’en sont-ils que plus forts pour faire face à leurs épreuves, pour rester calmes et efficaces dans la gestion des difficultés rencontrées, souvent dans des milieux hostiles.

Quant à nous, nos préoccupations concernant notre devenir oblitèrent sans aucun doute la qualité de vie de notre présent. Faut-il pour autant se contenter de vivre au jour le jour ? N’est-ce pas réducteur, voire simpliste ?

 « De tout, il restera trois choses :
La certitude que tout était en train de commencer, la certitude qu’il fallait continuer, la certitude que cela serait interrompu avant que d’être terminé.
Faire de l’interruption un nouveau chemin, faire de la chute un pas de danse, faire de la peur un escalier, du rêve un pont, de la recherche... une rencontre. »

Fernando Pessoa - Livre de l’intranquillité

" Le grand problème de notre temps tient à ce que nous ne comprenons pas ce qui se passe dans le monde.

 Nous sommes confrontés à l'obscurité de notre âme et à l'inconscient. Des impulsions pressantes en proviennent, obscures, impossibles à reconnaître. Il évide et met en pièces les formes de notre culture et ses réalisations historiques majeures. Nous les avons perdues, ou bien elles se trouvent dans le futur. Nos valeurs chancellent, il n'y a plus rien de certain, même la sanctissima causalitas est descendue du trône des axiomes et s'est transformée en simple champ de probabilités.

Quel est donc l'hôte terrifiant et funeste qui frappe à notre porte ?

La peur le précède, montrant que les ultimes valeurs se mobilisent à son encontre, ces valeurs auxquelles nous avons cru jusqu'ici et qui maintenant donc s'écroulent, cependant que notre seule certitude est de savoir que le monde nouveau sera différent de ce à quoi nous sommes habitués. " 

C.G.Jung, le 2 septembre 1960