René Magritte (1898-1967): Le double secret
« On ne comprend
absolument rien à la civilisation moderne si l’on n’admet pas d’abord qu’elle
est une conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure. »
Georges Bernanos
Je suis l’autre
Il faut
savoir s’oublier pour pouvoir retrouver sa trace, celle qui mène à soi. J’ai
passé ma vie à rechercher l’autre côté du miroir, à tenter de quitter cette
armure qui me colle à la peau et me sépare inexorablement de celui que je suis
réellement, au-delà des apparences illusoires d’une vie. Je n’ai jamais
abandonné ce chemin long, lent et difficile où l’âme et l’esprit se retrouvent,
si loin des escarpements apparents.
Je ne
suis pas celui que je vois, je suis l’autre, cet autre que nul ne connaît dans
sa singularité, sauf moi-même lors de brefs moments de lucidité qui m’emportent
à des altitudes vertigineuses. Il faut devenir présent à soi-même, retrouver
notre être profond et authentique en se rapprochant de l’état de spontanéité
naturelle propre à l’enfance ; l’enfant est toujours prêt à aborder des
ailleurs improbables que l’adulte va lui masquer par l’éducation et la
soumission à tous ces codes familiaux, moraux, sociaux qui vont étouffer tout
jaillissement en lui ; nous devons démolir tous ces murs construits pour
nous enfermer dans un moule rigide formaté par le système en place. Tant que
nous n’aurons pas entrepris ce travail de destruction-libération, nous serons
impuissants, condamnés à l’avoir et au faire, qui sont la façade du paraître,
au détriment de l’être, seul marqueur existentiel.
Pour ce
faire, il faut impérativement rentrer en solitude, en face à face avec
soi-même ; c’est à cette seule condition préalable que nous pourrons
effectuer ce travail de décapage nécessaire à notre renaissance en esprit.
Regardez Robinson Crusoë : il ne s’est découvert que lorsqu’il a connu
l’exil, sinon il aurait continué à jouer son rôle habituel, sans jamais se
connaître peut-être.
Nous
sommes tous comme Janus, dieu à deux faces ; nous sommes tous des êtres
recto-verso, le plus difficile étant de prendre conscience que la lumière est
du côté du verso alors que l’illusion règne sur le recto.
Ne
voyez-vous pas que la vérité est au fond de vous comme l’eau est au fond du
puits, et que le trajet pour l’aller puiser est simple, direct et surtout
vertical. Voilà bien le mot-clé : verticalité. Tant que vous vivez au
niveau de vos horizons de platitude, quels qu’ils soient, dans votre monotonie
quotidienne, vous êtes dans l’impossibilité de vous élever, de prendre votre
envol vers les dimensions de l’esprit.
Vous
devez donc vous engager à découvrir votre autre, l’homme spirituel qui
sommeille en vous et qui n’attend qu’une chose, que vous vous décidiez à le
réveiller. Cette démarche passe par le cœur et non par l’intellect ; elle
s’adresse à l’être spirituel et non à la personnalité. Vous devez provoquer ce
changement de statut par un travail conscient et régulier qui vous ouvrira
l’accès au monde de l’esprit. Si vous ne vous engagez pas dans la voie, vous
demeurerez soumis aux lois du système qui fera de vous un automate à jamais
incapable de rencontrer son autre et d’échapper au labyrinthe.
« Là je sentis
amèrement que j’étais un passant dans ce monde à la fois étranger et chéri, et
je frémis à la pensée que je devrais retourner dans la vie.»
Gérard de Nerval
« Nous pouvons vous
dire que si vous continuez sur ce chemin vous aurez d’immenses joies, et soyez
assurés que les joies spirituelles n’ont aucune commune mesure avec les joies
de la troisième dimension, celles que peuvent vous apporter les plaisirs du
monde dans lequel vous vivez. Une joie spirituelle rayonne dans votre âme ;
c’est comme si une joie profonde inondait en permanence tout ce que vous êtes,
même au niveau de votre humanité. Une joie spirituelle ne s’oublie jamais, elle
est mémorisée en vous, elle vous grandit, elle vous éclaire. »
Les Clés de la Sagesse...
« [...] ce que l'immense majorité des hommes
actuels célèbrent comme un "progrès", c'est là précisément ce qui
nous apparaît tout au contraire comme une profonde déchéance, car ce ne sont
manifestement que les effets du mouvement de chute, sans cesse accéléré, qui
entraîne l'humanité moderne vers les "bas-fonds" où règne la quantité
pure. »
René Guénon in « Le règne de la quantité et les signes
des temps »
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire