samedi 6 août 2011

Morceaux choisis - Jean Cocteau



"Je suis un menteur qui ne dit que la vérité."

«En fin de compte, tout s'arrange, sauf la difficulté d'être, qui ne s'arrange pas. »

« La jeunesse sait ce qu'elle ne veut pas avant de savoir ce qu'elle veut. »

Jean Cocteau 

« Qui sait écrire ? C'est se battre avec l'encre pour tâcher de se faire entendre.
Ou bien l'on soigne trop sa besogne ou bien on ne la soigne pas assez. Rarement on trouve l'entre-deux qui boite avec grâce. »

« Le verbe aimer est difficile à conjuguer: 
son passé n'est pas simple, son présent n'est qu'indicatif, et son futur est toujours conditionnel. »


« On vit beaucoup la tête sous l'aile. On répugne à se rendre compte du degré d'inculture et de désordre mental où barbotent les gens. Par prudence, on s'exerce à traverser la foule d'un œil un peu myope, d'une oreille un peu sourde. Mais la société mondaine nous éclabousse et nous jette en pleine crotte. Il est donc malsain de s'y rendre. Car nous rentrons chez nous l'âme piteuse, barbouillés des pieds à la tête, découragés jusqu'à l'os. La bêtise consterne et ne donne guère envie de rire. Plutôt elle attriste et nous rend bêtes par contamination. Nous ne nous dénouons et n'allons aux extrémités de nous-mêmes qu'en face des personnes qui rattrapent la balle. J'aime parler. J'aime écouter. J'aime qu'on me parle et qu'on m'écoute. J'aime le rire qui étincelle au choc. »

"Je sens une difficulté d'être."
C' est ce que répond Fontenelle, centenaire, lorsqu’il va mourir et que son médecin lui demande:
«Monsieur Fontenelle, que ressentez vous?"
Seulement, la sienne est de la dernière heure, la mienne date de toujours. Ce doit être un rêve que de vivre à l’aise dans sa peau. J’ai de naissance une cargaison mal arrimée. Je n' ai jamais été d' aplomb. Voilà mon bilan si je me prospecte. Et, dans cet état lamentable, au lieu de garder la chambre, j’ai bourlingué partout.

Depuis l’âge de quinze ans je n’ai pas arrêté une minute. Il m' arrive de rencontrer telle ou telle personne qui me tutoie, que je ne peux reconnaitre jusqu'a ce qu' une poigne profonde arrache de l'ombre, à l' improviste, tout le décor d'un drame ou elle tenait son rôle, où je tenais le mien, et que j' avais complètement oublié. J’ai été mêlé si fort à quantité de choses qu’il m’en tombe de la mémoire, et pas une, cinquante. Une vague de fond me les remonte à la surface, avec, comme dit La Bible "tout ce qu’il y a dedans". C’est à ne pas croire, le peu de traces que laissent en nous de longues périodes qu'il fallut vivre en détail.
C’est pourquoi, lorsque je fouille mon passé j'en dépote d'abord une figure qui entraine sa terre après elle. Si je recherche des dates, des phrases, des lieux, des spectacles, je chevauche, j’interpole, je barbouille, j'avance, je recule,
je ne sais plus rien."

« ... Intrépide et stupide, il te fallait prendre un parti. Cela limite la difficulté d'être, puisque pour ceux qui embrassent une cause, ce qui n'est pas cette cause n'existe pas. Mais toutes les causes te sollicitent. Tu as voulu ne te priver d'aucune. Te glisser entre toutes et faire passer le traîneau.
 Eh bien, débrouille-toi, intrépide ! intrépide et stupide, avance.
Risque d'être jusqu'au bout. »

Extraits de « La Difficulté d’être »

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire