lundi 16 février 2009

Ainsi parlait Aragon


Louis Aragon, né le 3 octobre 1897 à Neuilly-sur-Seine, mort le 24 décembre 1982 à Paris, est un écrivain français, poète, romancier, journaliste et essayiste. Avec André Breton, Paul Éluard, Philippe Soupault, il fut l'un des créateurs du dadaïsme parisien et du surréalisme.

Il signe une œuvre poétique plurielle, où la prose le dispute à la poésie à forme fixe, qu'il renouvelle. Après une première période très libre marquée par le surréalisme et ses jeux de langage, il retourne à une forme plus classique de poésie (vers mesurés et rimes), très inspirée par Guillaume Apollinaire, pour mieux rendre compte de la France (et de la résistance) à l'heure de la seconde guerre mondiale. Après guerre, l'aspect politique de sa poésie s'efface de plus en plus devant son aspect lyrique. Sans jamais renier ce retour au classicisme, il y intègre de plus en plus des formes plus libres, se rapprochant du surréalisme de ses débuts qu'il a toujours affirmé n'avoir jamais renié.


Je suis plein du silence assourdissant d'aimer.

Paradis artificiels. C'est un pléonasme.

On sait que le propre du génie est de fournir des idées aux crétins une vingtaine d'années plus tard.

Il y a plusieurs manières de se tuer : l’une est d’accepter absurdement de vivre.

Dire que l'art est difficile, suppose chez l'auteur de la phrase l'ignorance totale des mots dont il se sert. Qu'est-ce qui est difficile ? Un chemin, un client, un problème. Puis-je m'exprimer ainsi : le ciel est difficile... ? Oui, si je consens à mettre une majuscule au firmament, ce qui est un moyen de le personnaliser. Car difficile est une épithète qui ne peut se joindre qu'au défini. C'est pourquoi l'art n'est pas difficile. Il n'est pas facile non plus. Mais difficile et art ne peuvent être réduits au commun diviseur du verbe être. On voit par l'exemple qui précède que labeur surhumain est celui de l'homme qui armé d'une lanterne s'avance au milieu des livres pour y dépister les baraliptons. La critique, c'est le bagne à perpétuité. Pas de repos pour un critique.

Je demande à ce que mes livres soient critiqués avec la dernière rigueur, par des gens qui s'y connaissent, et qui sachant la grammaire et la logique, chercheront sous le pas de mes virgules les poux de ma pensée dans la tête de mon style. Parfaitement. Chaque ligne peut servir de prétexte à une infinie quantité de notes en petits caractères.

On peut mesurer l'influence et la force d'un esprit à la quantité de bêtises qu'il fait éclore.

Mon style est comme la nature ou plutôt réciproquement.

Bien écrire, c'est comme marcher droit.

Si vous écrivez, suivant une méthode surréaliste, de tristes imbécillités, ce sont de tristes imbécillités. Sans excuses.

La vie d'un homme, on me permettra cette remarque, n'est pas plus à l'échelle d'une phrase qu'à celle de la critique de cette phrase. Je me révolterai toujours contre tout essai de réduction d'un être vivant à une sorte de mannequin, dont les faits et gestes seraient compréhensibles à la façon des faits et gestes des monarques notés au jour le jour d'après des communiqués officiels.

Je vis dans des conditions qui me sont données, est-ce que j'ai choisi la forme de mon nez, la force de mon poing ? Quand vous lisez ce que j'écris, ne l'oubliez pas, la vie est un langage, l'écriture un tout autre. Leurs grammaires ne sont pas interchangeables. Verbes irréguliers.

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