Arbre couché par le vent
vers 1847
Quia
pulvis es
Parce que tu es poussière
Ceux-ci partent, ceux-là demeurent
Sous le sombre aquilon, dont les mille
voix pleurent,
Poussière et genre humain, tout
s’envole à la fois.
Hélas ! Le même vent souffle, en
l’ombre où nous sommes,
Sur toutes les têtes des hommes,
Sur toutes les feuilles des bois.
Ceux qui restent à ceux qui passent
Disent : - Infortunés ! déjà vos fronts
s’effacent.
Quoi ! vous n’entendrez plus la parole
et le bruit !
Quoi ! vous ne verrez plus ni le ciel
ni les arbres !
Vous allez dormir sous les marbres !
Vous allez tomber dans la nuit ! -
Ceux qui passent à ceux qui restent
Disent : - Vous n’avez rien à vous !
vos pleurs l’attestent !
Pour vous, gloire et bonheur sont des
mots décevants.
Dieu donne aux morts les biens réels,
les vrais royaumes.
Vivants ! vous êtes des fantômes ;
C’est nous qui sommes les vivants !
Victor Hugo - « Les
contemplations »
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