Il est urgent de ne rien faire
« Le Tao lui-même n'agit pas, et pourtant tout se fait par lui.
Perpétuel, il ne peut être nommé, ainsi il appartient au royaume des sans-choses.
Il est la forme sans forme et l'image sans image. Il est fuyant et insaisissable. »
Lao Tseu
Dans la recherche spirituelle, le plus difficile c’est de travailler dans la durée, parce que les résultats sont longs à obtenir et difficiles à définir.
Le temps use l’endurance et affaiblit les motivations ; d’autant plus qu’on a pris, même malgré soi, les habitudes générées par la société de consommation que nous vivons, et nous voulons obtenir tout, et tout de suite. Or, dans le domaine de la spiritualité, ça ne marche pas comme ça…
Les résultats obtenus sont toujours incertains et irréguliers ; incertains, parce que personnellement, par exemple, je ne suis jamais sûr de mener à bon terme une méditation quand je la débute, et irréguliers parce que la progression spirituelle s’effectue par paliers : toute avancée significative est suivie d’une période d’inertie difficile à supporter ; on avance en dents de scie et ce rythme n’est pas le plus facile à gérer.
Il faut arriver à se détacher du temps, de l’action et de son résultat ; en fait, il faut, si l’on veut bien faire, apprendre à ne rien faire.
« La non-action nécessite beaucoup plus d’action que l’action prétendument positive. Agir positivement c’est contrôler, supporter, fuir.
La non-action est la totale attention de l’observation. Dans cette observation, ce qui est observé subit une transformation.
Cette observation silencieuse exige non seulement de l’énergie physique mais aussi une profonde énergie psychologique. Nous sommes habitués à la première et ce conditionnement limite notre énergie.
Dans une observation complète, silencieuse, qui est non-action, il n’y a pas de dépense d’énergie et par conséquent l’énergie est sans limites.
L’énergie est hors du temps et ne se mesure pas.
Mais nos actions sont mesurables et nous ramenons ainsi cette énergie illimitée dans le cercle étroit du moi, et l’ayant circonscrite nous cherchons alors l’incommensurable.»
Jiddu Krishnamurti
Mais ne rien faire ne signifie pas devenir inerte ou passif. Au contraire, il s’agit d’échapper à l’emprise des sens, avec leur cortège de passions, de pulsions et de désirs matériels ; la non-action constitue une libération de toute autodétermination infligée à l’être par la personnalité de l’ego.
Tout comme dans le lâcher prise, il s’agit de se déconnecter des pressions que la dualité nous impose dans le monde de l’incarnation, afin de retrouver un état de réceptivité et de sérénité nous permettant d’entendre la voix de l’âme, au fond de soi.
Il ne s’agit pas d’un sommeil, même s’il peut en avoir l’apparence physique, mais bien d’un éveil profond favorisant l’expression de l’intuition, la connaissance sans limite, la clairvoyance, bref le domaine de la communication extrasensorielle.
Cette saisie immédiate, télépathique, nous met en relation avec des êtres supérieurs, en instaurant une communication d’esprit à esprit, nous permettant d’atteindre le monde de la vérité essentielle, exempt de toute entrave et de toute illusion.
L’intuition est la clé de l’initiation.
«Nous possédons tous une faculté secrète et merveilleuse qui nous permet de nous retirer du flux du temps vers notre moi le plus intérieur, dépouillé de tout apport extérieur, pour y intuitionner en nous-mêmes l'éternel sous la forme de l'immutabilité. Cette intuition est l'expérience la plus intime, et celle qui nous appartient le plus en propre: d'elle seule dépend tout ce que nous savons et croyons au sujet d'un monde suprasensible.»
Schelling
«Le plus arbitraire des préjugés prétend qu'à l'homme serait refusé le pouvoir de sortir de soi-même, d'être conscient au-delà des sens. L'homme est à tout moment capable de vivre en être suprasensible. Sinon, il ne serait pas un citoyen du monde; il serait un animal.»
« Nul ne se connaît s’il n’est rien autre que lui-même et s’il n’est pas en même temps un autre... Nous rêvons de voyages à travers l’univers, l’univers n’est-il donc pas en nous ? C’est en nous, sinon nulle part, qu’est l’éternité avec ses mondes, le passé et l’avenir... »
Novalis
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