lundi 6 septembre 2010

Métamorphose

Salvador Dali – Prémonition

Métamorphose


« Au fond, c'est ça la solitude : s'envelopper dans le cocon de son âme,
se faire chrysalide et attendre la métamorphose, car elle arrive toujours. »
August Strindberg
(extrait de « Seul »)

Parce qu’il savait que ce serait difficile, il préférait ne pas y penser, se dérober, éviter l’épreuve. Mais jusqu’à quand peut-on s’éviter soi-même, se jouer la comédie, se mentir ?
Cruel dilemme :
Peut-on exister sans être soi-même complètement, totalement, sans déni ni compromission ?
La réponse est claire et simple, définitive et sans appel : non.

Après mûre réflexion et une foultitude d’hésitations, il se résigna à se regarder en face, à s’affronter, à se repousser dans ses derniers retranchements, pour voir ce qu’il adviendrait, ce qui sortirait de lui-même.

La métamorphose tant espérée, voire attendue, ne se manifesta point.

Je ne me souviens plus où j’ai lu cette sentence, qui devient assourdissante à force de vérité et que personne ne connait plus : 
« Chaque pas sur le sentier doit être franchi par l'individu lui-même et nul raccourci, nul accès aisé, n'existent pour passer de l'obscurité vers la lumière. »

Elémentaire mon cher Watson, comme dirait l’autre, à la recherche de sa dose…

Dans le dictionnaire, le Petit Robert, nous trouvons la définition suivante : « la métamorphose est un changement de forme, de nature ou de structure si considérable que l’être, ou la chose qui en est l’objet, n’est plus reconnaissable. »

Mais, bien au-delà de cette définition purement étymologique, il faut ajouter à cette notion une intervention quasiment divine, si l’on s’en remet à la mythologie, sinon magique, si l’on considère tous les pouvoirs dont dispose l’être à partir du moment où il en a pris conscience, en les activant de ce fait.

En résumé, pour qu’il y ait métamorphose, il suffit de changer le paraitre en être.
Simple, non ?
Pas tout-à-fait, car il faut changer aussi de dimension essentielle ; il faut passer du monde de la matière, du pouvoir, de l’argent à celui de l’esprit, du dénuement, des valeurs primordiales.
En clair, ça élimine déjà tous les conducteurs de quatre-quatre, et de grosses cylindrées, qui cultivent le prolongement phallique inconscient de leur personnalité… pour compenser un manque de reconnaissance.

André Breton le formule au début de Nadja (1928) : 
« Qui suis-je ?
Si, par exception, je m’en rapportais à un adage :
en effet, pourquoi tout ne reviendrait-il pas à savoir qui je hante ?
 Je dois avouer que ce dernier mot m’égare, tendant à établir entre certains êtres des rapports plus singuliers, moins évitables, plus troublants que je ne pensais.
Il dit beaucoup plus qu’il ne veut dire, il me fait jouer de mon vivant le rôle d’un fantôme, évidemment il fait allusion à ce qu’il a fallu que je cessasse d’être, pour être qui je suis. »

Donc, pour pouvoir se métamorphoser, il faut cesser de jouer un rôle, aussi gratifiant semble-t-il être, pour exister vraiment, en toute simplicité, en toute authenticité, en dehors de tout code social, professionnel, ou autre.

Mais les choses se compliquent encore plus, parce que nous ne sommes pas dans le registre de la métamorphose biologique, inscrite génétiquement et donc automatique, comme celle du têtard devenant grenouille, ou celle de la chrysalide libérant le papillon, mais bien dans celle de la métamorphose spirituelle qui doit transformer l’homme biologique en être-esprit, purement facultative car soumise à notre libre-arbitre et à notre faculté latente de nous autodéterminer.
Et le vouloir ne suffit pas à déclencher à lui-seul la métamorphose de l’être, il faut également le pouvoir, qui repose sur une procédure adéquate de purification de soi et de dynamisation des énergies vitales.

L'énergie se présente sous une forme triple : spirituelle, dynamique et physique. Notre réalisation pour être complète doit passer par les trois étapes de l'énergie spirituelle, consécration finale, de l'énergie dynamique, action créatrice, de l'énergie physique, « anima sana in corpore sano » selon la formule célèbre de Juvénal. Les trois niveaux d'énergie s’imbriquent insensiblement l'un dans l'autre, tout en restant solidaires ; on ne peut favoriser une énergie au détriment des deux autres.
Pour arriver à mobiliser l’énergie spirituelle, il faut respecter et améliorer le corps physique, qui est le temple de l’esprit et développer le sens de l’action qui va générer l’énergie dynamique, ce que traduit l’image symbolique « le dormeur doit se réveiller ».

 L'énergie est une réserve de vitalité qui existe en nous et qu’il nous appartient de solliciter et de stimuler, pour l’activer. Alors, progressivement, nous verrons se réaliser sous nos yeux ébahis le long processus de notre propre métamorphose.

La vie est un parcours vers soi-même. Seul celui qui décide de marcher à sa rencontre peut, un jour, se découvrir et se retrouver.

Savoir trouver sa voie dans un espace où les chemins n’existent pas relève de la gageure, et c’est pourtant notre lot à tous.

J’en vois, tout autour de moi, qui ne marchent pas, ou qui marchent à l’envers ; j’ai envie de les aider, j’essaie de leur dire : « Ouvrez les yeux, comprenez le sens de votre vie. »

Mais ils n’entendent pas, ils ne voient pas, ils se laissent vivre sans même se rendre compte que  la vie qui les a déjà laissés de côté.


"Du chemin déjà fait sans être curieux, sur celui qui vous reste ayez toujours les yeux."

Ovide
«Les Métamorphoses » - Chant Ier (env. 7 av. J.-C.)


«  Range le livre, la description,
la tradition, l'autorité, et
prend la route pour
découvrir toi- même... »
  
Jiddhu Krishnamurti

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