mardi 18 mai 2010

Morceaux choisis - Novalis


 
"La poésie est représentation de l'âme, du monde intérieur dans sa totalité."

"Si j'ai vécu jusqu'ici dans le présent, et dans l'espoir du bonheur terrestre, il me faut désormais vivre entièrement dans l'avenir véritable."

« Je veux mourir joyeux comme un jeune poète. »

 
Dernier recueil
« On est seul avec tout ce qu'on aime. »

« Le besoin d'amour trahit déjà l'existence en nous d'un dédoublement antérieur, d'une séparation en deux. »

« Le mariage est le mystère suprême. Le mariage est chez nous un mystère popularisé. Dommage que nous n'ayons le choix qu'entre mariage et solitude, chez nous. Ce sont les deux extrêmes; - mais combien peu de gens sont capables d'un mariage authentique - et combien peu sont capables aussi de supporter la solitude. Il y a des liaisons de toutes sortes. Une liaison éternelle, voilà le mariage. L'homme a-t-il la femme comme but? - et la femme est-elle sans but? »

« De tout temps, l'amour a donné des romans, autrement dit l'art d'aimer a toujours été romantique. »

Les Fragments
 
"Le monde imaginaire situe le monde futur tantôt dans les hauteurs, tantôt dans la profondeur, tantôt dans la métempsychose de nous-mêmes. Nous rêvons de voyages à travers l'univers; mais l'univers n'est-il pas en nous? Les profondeurs de notre esprit, nous ne les connaissons pas.

C'est intérieurement que va le chemin mystérieux. En nous, ou nulle part, sont l'éternité et ses mondes, l'avenir et le passé. Le monde extérieur est l'univers des ombres, qui projette ses ombres dans le royaume de la lumière. Si tout ce qui nous est intérieur nous apparaît aujourd'hui tellement obscur, solitaire et informe, combien en sera-t-il autrement quand cet obscurcissement sera derrière nous, et rejeté ce corps d'ombre! Nous serons satisfaits de jouissances comme jamais, car notre esprit a souffert privation."

Les disciples à Saïs

« Les hommes vont de multiples chemins. Celui qui les suit et qui les compare verra naître des figures qui semblent appartenir à une grande écriture chiffrée qu’il entrevoit partout : sur les ailes, la coquille des œufs, dans les nuages, dans la neige, dans les cristaux et dans la conformation des roches, sur les eaux qui se prennent en glace, au-dedans et au-dehors des montagnes… » Ainsi le disciple s’engage-t-il sur le chemin intérieur en direction d’une Figure, d’une « vierge » - et d’une « patrie sacrée » qui est l’Orient, conformément aux enseignements du Maître :
« Il veut que nous suivions chacun notre propre voie, car toute voie nouvelle traverse de nouvelles contrées et reconduit chacun, à la fin, à ce domicile, à cette patrie sacrée ».
 
Hymne à la nuit (III)

"Un jour que je versais amèrement des larmes, que défaite en douleur, mon espérance allait s'évanouir, - et j'étais solitaire, debout près de ce tertre aride qui, dans son lieu obscur et resserré, détenait l'être de ma vie - solitaire comme aucun solitaire n'avait jamais été - oppressé d'une angoisse indicible, à bout de force, plus rien qu'un souffle de détresse... Comme alors je quêtais des yeux quelque secours, ne pouvant avancer ni reculer non plus, un immense regret me retenait à la vie qui fuyait, s'éteignait; - alors, du fond des bleus lointains, de ces hauteurs de ma félicité ancienne, vint un frisson crépusculaire, - et par un coup se rompit le lien natal : la chaîne de la lumière.

Loin s'est enfuie la terrestre splendeur, et avec elle ma désolation : - le flot de la mélancolie est allé se résoudre en un nouveau, un insondable monde. O nocturne enthousiasme, toi le sommeil du ciel, tu m'emportas : - le site s'enlevait doucement en hauteur, et sur le paysage flottait mon esprit libéré de ses liens, né à nouveau. Le tertre n'était plus qu'un nuage de poussière, que transperçait mon regard pour contempler la radieuse transfiguration de la bien-aimée. L'éternité reposait en ses yeux - j'étreignis ses mains, et ce fut un étincellent, un indéfectible lien que nous firent les larmes. Les millénaires passaient au loin comme un orage. Et ce furent des larmes d'extase que je versai sur son épaule, au seuil de la vie nouvelle.

Ce fut là le premier, l'unique rêve, - et depuis lors, à jamais, je sens en moi une foi éternelle, immuable, en le ciel de la Nuit et sa lumière, la Bien-Aimée."

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