mardi 20 avril 2010

Morceaux choisis - Georges Gurdjieff


 
« Les hommes sont des machines. »
Georges Gurdjieff
 
[...] Les hommes sont des machines, et de la part de machines on ne saurait attendre rien d’autre que des actions machinales.

Peut-on cesser d’être une machine?
Je demandai :
— Un homme peut-il cesser d’être une machine?
— Ah! c’est toute la question, dit G. Si vous en aviez posé plus souvent de pareilles, peut-être nos conversations auraient-elles pu nous mener quelque part. Oui, il est possible de cesser d’être une machine, mais pour cela, il faut avant tout connaître la machine. Une machine, une machine réelle, ne se connaît pas elle-même et elle ne peut pas se connaître. Quand une machine se connaît, elle a cessé dès cet instant d’être une machine ; du moins, n’est-elle plus la même machine qu’auparavant. Elle commence déjà d’être responsable pour ses actions.
— Cela signifie, selon vous, qu’un homme n’est pas responsable de ses actions?
— Un homme — il souligna ce mot — est responsable. Une machine n’est pas responsable.
On ne fait rien ; tout arrive.
[...] Mais à vrai dire, personne ne fait rien et personne ne peut rien faire. C’est la première chose qu’il faut comprendre. Tout arrive. Tout ce qui survient dans la vie d’un homme, tout ce qui se fait à travers lui, tout ce qui vient de lui — tout cela arrive. Et cela arrive exactement comme la pluie tombe, parce que la température s’est modifiée dans les régions supérieures de l’atmosphère, cela arrive comme la neige fond sous les rayons du soleil, comme la poussière se lève sous le vent.
« L’homme est une machine. Tout ce qu’il fait, toutes ses actions, toutes ses paroles, ses pensées, ses sentiments, ses convictions, ses opinions, ses habitudes, sont les résultats des influences extérieures, des impressions extérieures. De par lui-même un homme ne peut pas produire une seule pensée, une seule action. Tout ce qu’il dit, fait, pense, sent — tout cela arrive. L’homme ne peut rien découvrir, il ne peut rien inventer. Tout cela arrive.
« Mais pour établir ce fait, pour le comprendre, pour se  convaincre de sa vérité, il faut se libérer des milliers d’illusions sur l’homme, sur son être créateur, sur sa capacité d’organiser consciemment sa propre vie, et ainsi de suite. Rien de tel n’existe. Tout arrive — les mouvements populaires, les guerres, les révolutions, les changements de gouvernement, tout cela arrive. Et cela arrive exactement de la même façon dont tout arrive dans la vie de l’homme individuel. L’homme naît, vit, meurt, construit des maisons, écrit des livres, non pas comme il le désire, mais comme cela arrive. Tout arrive. L’homme n’aime pas, ne hait pas, ne désire pas — tout cela arrive.
« Mais aucun homme ne vous croira jamais, si vous lui dites qu’il ne peut rien faire. Rien ne peut être dit aux gens de plus déplaisant, de plus offensant. C’est particulièrement déplaisant et offensant parce que c’est la vérité, et que personne ne veut connaître la vérité.
[...] En vérité cependant, tout est fait de la seule manière possible. Si une seule chose pouvait être faite différemment, tout pourrait devenir différent. Et alors peut-être n’y aurait-il pas eu la guerre.

« Essayez de comprendre ce que je dis : tout dépend de tout, toutes les choses se tiennent, il n’y a rien de séparé. Tous les événements suivent donc le seul chemin qu’ils puissent prendre. Si les gens pouvaient changer, tout pourrait changer. Mais ils sont ce qu’ils sont, et par conséquent les choses, elles aussi, sont ce qu’elles sont. »
 
« Fragments d’un enseignement inconnu »
Ouspensky
(extraits)

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