vendredi 5 décembre 2008

Silence & solitude



Le silence est parole de l’âme, sans bruit, sans son ; c’est l’expression du Je, toujours brouillée par le vacarme de l’Ego, qui occupe le terrain à grand renfort de bruit, de cris.

Tous ces gens qui parlent toujours et sans cesse n’ont vocation qu’à s’écouter parler dans le désert de leur âme. Parler, c’est occuper un vide, combler une vacance, se rassurer en se prouvant que si l’on fait du bruit, on existe. On parle très souvent pour ne rien dire, pour donner le change, pour jouer un rôle ; on ne parle pas pour signifier quelque chose mais pour impressionner l’autre. On parle de peur d’être réduit au silence, rendu à soi-même, dans la solitude qui décape, qui dénude, qui révèle l’être.

On parle pour éviter que l’autre ne prenne la parole, pour se donner une stature de supériorité, comme le maître avec son élève, on parle à tort et à travers, toujours et sans cesse, parce que c’est pour les hâbleurs le seul moyen qu’ils ont d’exister. Un proverbe, issu du Talmud, nous dit que « la parole est d’argent » et que « le silence est d’or », ce qui confirme bien que la parole n’est qu’une monnaie d’échange, un instrument de socialisation, l’outil d’une civilisation collectiviste qui sacrifie l’être à l’anonymat du groupe.

Pour faire le silence en et autour de soi, il est sans doute nécessaire de pratiquer la solitude qui le génère tout naturellement.

Ecoutons Edouard Schuré, parlant du Bouddha : « Il éprouva sans doute alors cette ivresse de la solitude… Ses pensées plongeaient éperdument dans la spirale infinie du monde intérieur. Le jour, il méditait âprement, il réfléchissait avec intensité sur lui-même et sur les autres, sur l’origine du mal et sur le but suprême de la vie. Il cherchait à s’expliquer l’enchaînement fatal des destinées humaines par des raisonnements serrés, aigus, impitoyables.
La nuit, il se laissait aller à la dérive sur l’océan du rêve et y repensait le lendemain. Et son sommeil devenait de plus en plus transparent. C’était comme une série de voiles superposés, de gazes légères qui, en se retirant, faisaient voir des mondes derrière des mondes.
D’abord, sa propre vie passée se déroula à rebours en images successives. Puis il se vit lui-même et se reconnut sous une autre figure, avec d’autres passions, comme dans une autre existence.
Et, derrière ce voile fluide, apparaissaient d’autres figures inconnues, étranges, énigmatiques, qui semblaient l’appeler… »

En fait, il faut créer en nous les conditions de perception extrasensorielle capables de nous faire voir au-delà du miroir, quitter le monde de l’illusion pour accéder à celui de la réalité spirituelle. Ambitieux programme qui peut s’étaler sur une vie entière, ou sur plusieurs ; il s’agit d’entreprendre un périple initiatique qui nous mènera au terme libératoire, à la seule condition de l’entreprendre.

Le soir tombe dans le calme et la quiétude de l’esprit et du cœur.
C’est le moment privilégié de se replier pour faire le vide en soi.
Progressivement des images se forment et apparaissent, lentement ; derrière les yeux fermés, un nouveau monde se dévoile. Le souffle se ralentit, le muscle se relâche et la vigilance s’oublie. C’est le temps de la concentration, de la méditation, de la connaissance de soi et des communications avec l’au-delà.

Au soir de sa vie, c’est la même procédure qui se déroule : il faut savoir lâcher prise, faire le vide en soi, établir le contact avec ses guides et préparer la transition, le passage vers l’au-delà.

Il ne faut jamais oublier que, dans tous les cas de figure, on chemine seul. Naissance, épreuves, maladie, mort ne sont que les différentes étapes successives de notre parcours personnel, de notre expérience vécue. Même l’amour, qui permet aux amants de partager le même lit, ne leur permettra jamais de partager les mêmes rêves.

Parce que la solitude est la règle de vie, elle est la servitude de l’oubli. Oubli de soi, de l’autre, du temps et de l’espace ; effacement de l’Ego pour retrouver le Je essentiel qui attend sa libération pour que l’Être existe enfin.

De cet oubli de soi l’Être renaîtra, tout comme le papillon au sortir de la chrysalide.


" Vos cœurs connaissent en silence les secrets des jours et des nuits.
Mais vos oreilles se languissent d'entendre la voix de la connaissance en vos cœurs.
Vous voudriez savoir avec des mots ce que vous avez toujours su en pensée.
Vous voudriez toucher du doigt le corps nu de vos rêves.

Et il est bon qu'il en soit ainsi.
La source secrète de votre âme doit jaillir et couler en chuchotant vers la mer,
Et le trésor de vos abysses infinis se révéler à vos yeux.
Mais qu'il n'y ait point de balance pour peser votre trésor inconnu,
Et ne sondez pas les profondeurs de votre connaissance avec tige ou jauge,
Car le soi est une mer sans limites ni mesures.

Ne dites pas: "J'ai trouvé la vérité", mais plutôt: "J'ai trouvé une vérité".
Ne dites pas: "J'ai trouvé le chemin de l'âme". Dites plutôt: "J'ai rencontre l'âme marchant sur mon chemin".
Car l'âme marche sur tous les chemins.
L'âme ne marche pas sur une ligne de crête, pas plus qu'elle ne croît tel un roseau.
L'âme se déploie, comme un lotus aux pétales innombrables."

Khalil Gibran

"Apprenez à être silencieux pour entendre ce qu'il y a d'authentique en vous, afin de l'entendre chez les autres"

Marian Edelman

"Il ne faut jamais avoir peur de s'arrêter un moment pour rréfléchir"

Lorraine Hansbery

"Tout le malheur de l'homme vient d'une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre"

Blaise Pascal

" Le point de départ de la créativité est le Silence..."

David Spangler

"Qui ne sait pas peupler sa solitude, ne sait pas non plus, être seul dans une foule affairée."

Charles Baudelaire

"En moi il y a un endroit où je vis toute seule, c'est là qu'on renouvelle ses sources qui ne tarissent jamais."

Pearl Buck

"La place que chacun accorde dans sa vie à la solitude et au silence reflète exactement la place qu'il accorde à son âme, à sa vie intérieure."

"Tant qu'un être humain se questionne, il ouvre l'espace devant lui, il marche ! Les certitudes sont aussi des servitudes. Plus on va à l'intérieur de soi, plus le paysage s'ouvre."

"La parole de l'esprit est celle qui dit que tout est possible, même au fond du désespoir."
Jacqueline Kelen

"Seul le silence est grand, tout le reste est faiblesse."
Alfred de Vigny

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