mercredi 1 octobre 2008

Ainsi parlait René Guénon

René Guénon

René Guénon, né le 15 novembre 1886 à Blois en France et mort le 7 janvier 1951 au Caire en Égypte, est un auteur français, ayant publié dix-sept ouvrages de son vivant ( plus dix ouvrages regroupant divers articles ayant été publiés à titre posthume, soit au total vingt-sept titres), tous régulièrement réédités, qui ont trait, principalement, à la métaphysique, à l'ésotérisme et à la critique du monde moderne.
Dans son œuvre il se propose, soit d'« exposer directement certains aspects des doctrines métaphysiques de l'Orient », doctrines métaphysiques que René Guénon définissait comme étant « universelles», soit d'« adapter ces mêmes doctrines [pour des lecteurs occidentaux] en restant toujours strictement fidèle à leur esprit » ; il ne revendiqua que la fonction de « transmetteur » de ces doctrines, dont il déclarait qu'elles sont de nature essentiellement « non-individuelle », reliées à une connaissance supérieure, « directe et immédiate » qu'il nomme « intuition intellectuelle ». Ses ouvrages, écrits en français (il contribua également en arabe pour la revue El Maarifâ), sont traduits en plus de vingt langues.
Son œuvre, qui oppose aux civilisations orientales restées selon lui fidèles à l'« esprit traditionnel», l'ensemble de la civilisation moderne considérée comme déviée, a modifié en profondeur la réception de l'ésotérisme en Occident dans la seconde moitié du XXe siècle, et a eu une influence marquante sur des auteurs aussi divers que Mircea Eliade, Raymond Queneau ou encore André Breton

"La crise du monde moderne"


Le chaos social.

Cela peut sembler paradoxal à une époque de "spécialisation" à outrance, et pourtant il en est bien ainsi, surtout dans l'ordre politique ; si la compétence des "spécialistes" est souvent fort illusoire, et en tous cas limitée à un domaine très étroit, la croyance à cette compétence est cependant un fait, et l'on peut se demander comment il se fait que cette croyance ne joue plus aucun rôle quant il s'agit de la carrière des hommes politiques, où l'incompétence la plus complète est rarement un obstacle. Pourtant, si l'on y réfléchit, on s'aperçoit aisément qu'il n'y a là rien dont on doive s'étonner, et que ce n'est en somme qu'un résultat très naturel de la conception "démocratique", en vertu de laquelle le pouvoir vient d'en bas et s'appuie essentiellement sur la majorité, ce qui a nécessairement pour corollaire l'exclusion de toute véritable compétence, parce que la compétence est toujours une supériorité au moins relative et ne peut être que l'apanage d'une minorité.

C'est pour créer cette illusion qu'on a inventé le "suffrage universel" : c'est l'opinion de la majorité qui est supposée faire la loi ; mais ce dont on ne s'aperçoit pas, c'est que l'opinion est quelque chose que l'on peut très facilement diriger et modifier ; on peut toujours, à l'aide de suggestions appropriées, y provoquer des courants allant dans tel ou tel sens déterminé : nous ne savons plus qui a parlé de "fabriquer l'opinion", et cette expression est tout à fait juste, bien qu'il faille dire, d'ailleurs, que ce ne sont pas toujours les dirigeants apparents qui ont en réalité à leur disposition les moyens nécessaires pour obtenir ce résultat.


Une civilisation matérielle.

Car c'est ainsi : l'Occident moderne ne peut tolérer que des hommes préfèrent travailler moins et se contenter de peu pour vivre ; comme la quantité seule compte, et comme ce qui ne tombe pas sous le sens est d'ailleurs tenu pour inexistant, il est admis que celui qui ne s'agite pas et qui ne produit pas matériellement ne peut être qu'un "paresseux" ; sans même parler à cet égard des appréciations portées couramment sur les peuples orientaux, il n'y a qu'à voir comment sont jugés les ordres contemplatifs, et cela jusque dans les milieux soi-disant religieux.

Dans un tel monde, il n'y a plus de place pour l'intelligence ni pour tout ce qui est purement intérieur, car se sont là des choses qui ne se voient ni ne se touchent, qui ne se comptent ni ne se pèsent : il n'y a de place que pour l'action extérieure sous toutes ses formes, y compris les plus dépourvues de toute signification. Aussi ne faut-il pas s'étonner que la manie anglo-saxonne du "sport" gagne chaque jour du terrain : l'idéal de ce monde, c'est l'"animal humain" qui a développé au maximum sa force musculaire ; ses héros, ce sont les athlètes, fussent-ils des brutes ; ce sont ceux-là qui suscitent l'enthousiasme populaire, c'est pour leurs exploits que les foules se passionnent ; un monde où l'on voit de telles choses est vraiment tombé bien bas et semble bien près de sa fin.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire