samedi 11 octobre 2008


Le labyrinthe


« Jadis, dans la Crète montagneuse, le labyrinthe déroulait entre ses murs aveugles, les entrelacements de ses chemins et la ruse de ses mille détours, si bien qu’aucun signe ne permettait à l’égaré de reconnaître son erreur ni de revenir sur ses pas. »
Virgile


D’où vient ce sentiment de décalage, de ne pas être en situation, que j’ai toujours ressenti tout au long de ma vie ? Pourquoi cette impression de ne pas être à ma place, sans jamais savoir où est la bonne place ?

Et cette envie d’être ailleurs, confusément, sans même savoir où, étant persuadé que je ne suis pas d’ici. J’ai la conviction d’être un acteur qui sait qu’il joue un rôle, dans un scénario et un décor donnés, temporairement, entre un levé et un baissé de rideau. A cette différence prés que ce dernier, lorsqu’il quitte la scène retrouve la vraie vie, en toute conscience et confiance, sans aucune ambiguïté et en parfait équilibre avec lui-même.
Alors que, pour ma part, tout se passe comme si je ne pouvais pas quitter le théâtre, où la représentation est continuelle, et retrouver la vraie vie. Je suis un acteur amnésique et qui, de plus, joue sans connaître le scénario. A la différence de l’acteur, j’ai la totale liberté de mes faits et gestes, j’improvise en permanence puisque c’est moi qui écris mon rôle et construis ma pièce, au jour le jour. Liberté, mais conditionnelle, tout comme celle du rat dans le labyrinthe qui peut aller où bon lui semble, sans jamais en sortir. Alors, liberté ou leurre, réalité ou illusion, vie ou rêve ?

En fait, tout est une question de temps. On sait qu’à un moment donné le rat trouvera la sortie, tout comme moi. On sait aussi que c’est l’homme qui a mis le rat dans le labyrinthe, pour étudier son comportement à travers ses réactions. Mais moi, je ne sais pas qui m’a mis là et pourquoi faire ; je ne sais pas ce qu’on attend de moi et je pressens des présences que je ne peux identifier. Il y a quelque chose qui m’échappe, que je devine, une sensation, une intuition que je ne suis pas seul ; pourtant, je ne vois personne. Je suis entré dans la vie pour faire mes preuves, comme le taureau dans l’arène, comme le rat dans son labyrinthe; il faudra que j’en sorte pour comprendre ce que j’ai fait.

Et si tout cela n’existait pas ? S’il n’y avait ni rat, ni labyrinthe, ni homme, mais seulement des ombres sur un grand théâtre de marionnettes ; si nous étions, nous-mêmes, le montreur et sa poupée, le créateur et sa chose agitée au bout des ficelles ? Souvenez-vous de la caverne de Platon : ce que nous voyons n’existe pas, ce n’est que le reflet d’un ailleurs qui navigue dans le monde des idées, d’un paradis perdu ancré dans notre mémoire.

Lamartine a dit que « l’homme est un dieu tombé qui se souvient des cieux « ; sans doute, mais pourquoi a-t-il eu le mauvais goût de tomber dans un labyrinthe ?

Dans la mythologie, Dédale construisit un labyrinthe à Cnossos pour y enfermer le Minotaure ; Thésée eut besoin du fil d’Ariane pour accomplir son œuvre : tuer le Minotaure et sortir, indemne, du labyrinthe. Mais où donc est notre minotaure à nous ; est-ce le Gardien du Seuil que nous devrons affronter à notre libération ?
On trouve déjà le labyrinthe dans l’Egypte ancienne, dans le temple de Salomon, sur le parvis et à l’intérieur des églises du moyen âge. Virgile y fait allusion dans le 6ème livre de l’Enéide, en mentionnant sa présence sur les portes de Cumes, où prophétisait l’oracle. En fait, depuis des temps immémoriaux, le labyrinthe accompagne l’homme. Mais pourquoi ? Quelle est sa signification ?
Nietzsche se proclamait homme labyrinthique, c'est-à-dire selon lui, celui qui s'enfonce toujours plus, détours et retours, profondément dans le chaos, jusqu'à la vérité radicale, plus réelle pour lui que la "vérité" elle-même. Quoi qu'il en soit, l'idée fondamentale du labyrinthe a toujours été la même: la conscience que l'homme peut prétendre atteindre le dépassement, la liberté de son esprit, que ce soit par la foi ou par la connaissance.

Le pèlerinage dans le labyrinthe, pour ne pas s’y perdre, doit s’effectuer en trois temps :
La Purification qui s’obtient avec l’accession au Centre.
L’Illumination qui intervient en son centre Centre.
La Réalisation qui consiste à sortir du labyrinthe en ayant fusionné le Moi et le Soi.
Le parcours s’achève sur l’unification de l’être et l’accès à l’intuition pure. Le Cœur du labyrinthe reste mystérieux ; on ne peut l’atteindre que dans une aventure intérieure, intime et personnelle, à condition d’accepter de se perdre. L’important n’est pas d’en sortir mais bien d’y entrer pour chercher la clé.


Modernité du labyrinthe :

« Un des maîtres mots de demain. Le microprocesseur est déjà un labyrinthe. Les jeux vidéo sont aussi parcourus de labyrinthes, quêtes semées de multiples pièges. Le Net, les réseaux de pouvoir et d’influence, les organigrammes, les cursus universitaires, les villes, les carrières au sein de l’entreprise en seront aussi. L’empreinte digitale est un labyrinthe caractéristique de l’identité de chaque individu. Le cerveau est un labyrinthe de neurones. Jusqu’à la psychanalyse qui désigne l’inconscient comme un monstre tapi au fond d’un labyrinthe et se donne pour objet de comprendre les rêves où le dormeur est confronté au choix d’un chemin à prendre dans un dédale d’interdits.
Il faudra apprendre à "penser labyrinthe". Qualités requises : entêtement, mémoire, intuition, curiosité. Toutes qualités du navigateur ou du nomade. »

Extrait de: ATTALI, Jacques. Dictionnaire du 21e siècle, Paris, Fayard, 1998, 350 p.

Secrets oubliés des derniers initiés gitans :

« La tête est le sanctuaire intérieur du temple qu’est le corps humain. Il est à la fois créé et protégé par les circonvolutions du labyrinthe qu’est le cerveau.
Á chacun de ses tournants l’homme accomplit une étape de son évolution.
Au centre de la spirale, il se rencontre lui-même et peut découvrir alors le mécanisme du labyrinthe. »
JILL PURCE
PIETRO VALENTI

Le labyrinthe est ici assimilé au cerveau. Nous remarquons, dans la création de ce labyrinthe sacré, une répartition symétrique des couloirs qui représente les circonvolutions cérébrales des hémisphères, droit et gauche. Il y a une répartition harmonieuse des couloirs sur différentes longueurs ou rythmes. Ce qui représente une clef de pratique des exercices et la nécessité d’un équilibre inter-hémisphérique pour accéder au monde spirituel.
Ce labyrinthe est celui de la cathédrale de Chartres. En son centre se situe le mystère des mystères, c’est le lieu de l’initiation. Il convient non pas de sortir du labyrinthe, mais bien d’aller au centre. Ce centre représente une fleur en 7 parties. Il s’agit, pour les initiés, des 7 chakras cérébraux dont l’éveil précède celui des 7 centres spinaux. Il faut activer ces centres et ces circuits.Le centre s’assimile au cerveau limbique, au thalamus. Il s’agit de la zone secrète qui doit être activée, et qui est en relation avec la moelle épinière et la circulation de la respiration du liquide céphalo-rachidien.
Le Labyrinthe au Cœur de l'Homme et inversement

Un regard sensible et intériorisé sur le labyrinthe, qui habite l’âme de l’humanité depuis la nuit des temps.

Les approches historique, mythologique, ésotérique, symbolique et psychologique se rejoignent dans une définition unanime du labyrinthe. Il s’agit d’une structure physique, psychique et spirituelle close qui a la particularité de proposer un chemin de l’entrée vers son centre en empruntant son intégralité de son territoire. L’étymologie universellement reconnue renvoie à la caverne, la galerie, l’errance, l’erreur, l’égarement, la peur de se perdre, la protection, l’enfer, le temple, l’utérus et la matrice. Les premières expériences du labyrinthe, bien qu’elles furent empiriques montrent la dimension sacrée de cet archétype à travers toutes les cultures. La dimension de contenance à nature féminine justifie un parcours intérieur guidé aux travers les méandres des mystères de la psyché relié aux lois universelles. Le cheminement au sein du labyrinthe nécessite que l’adepte soit accompagné afin que son âme puisse développer avec lucidité son intuition profonde : c’est-à-dire découvrir par sa propre expérience qu’il est le révélateur et l’acteur de sa vie ancienne, actuelle et à venir à travers le cycle des morts et des vies successives. A ce titre l’expérience du labyrinthe est avant tout initiatique. Accepter l’épreuve personnelle et intime du labyrinthe permet d’accéder à la connaissance, cette notion se différencie clairement du savoir reposant sur un acquis extériorisé et analytique.

Dominique AUCHER
Auteur de : « LE LABYRINTHE AU CŒUR DE L’HOMME et inversement »aux éditions M.C.O.R La Table d’Emeraude

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