lundi 3 novembre 2008

Ainsi parlait Chateaubriand


François-René de Chateaubriand


Je voudrais n’être pas né ou être à jamais oublié.

François-René, vicomte de Chateaubriand, né à Saint-Malo le 4 septembre 1768 et mort à Paris le 4 juillet 1848, est un écrivain romantique et homme politique français.

L'homme n'a pas besoin de voyager pour s'agrandir ; il porte avec lui l'immensité.

La misère de l'homme ne consiste pas seulement dans la faiblesse de sa raison, l'inquiétude de son esprit, le trouble de son cœur ; elle se voit encore dans un certain fond ridicule des affaires humaines.

La vie, le bonheur, l'infortune, tiennent à un souffle. Vous mourez : deux heures après on ne pense plus à vous. Vous vivez, on n'y pense pas davantage. Qu'importent vos joies, vos peines, votre existence, non seulement à votre voisin qui ne vous a jamais vu, mais encore à cette tourbe qu'on appelle vos amis ? Pourquoi donc se faire une affaire de la vie ? elle ne mérite pas la moindre attention.

Aussitôt qu'une pensée vraie est entrée dans notre esprit, elle jette une lumière qui nous fait voir une foule d'autres objets que nous n'apercevions pas auparavant.

Les sentiments d'un certain ordre s'accroissent en proportion des malheurs de l'objet aimé : c'est la flamme qui se propage plus rapidement au souffle de la tempête.

La vertu est quelquefois oubliée dans son passage ici-bas, mais elle revit tôt ou tard ; on la retire des tombeaux comme on retire du sein de la terre une statue antique qui fait l'admiration des hommes.

Il serait étrange que l'homme prétendît à une constance inaltérable, lorsque toute la nature change autour de lui : l'arbre perd ses feuilles, l'oiseau ses plumes, le cerf ses rameaux. L'homme seul dirait : « Mon âme est inébranlable ; telle elle est aujourd'hui, telle elle sera demain » ; l'homme dont les sentiments sont plus inconstants que les nuages ! L’homme qui veut et ne veut plus ! L’homme qui se dégoûte même de ses plaisirs, comme l'enfant de ses jouets !
Il faut des secrets pour réparer la beauté du corps : il n'en faut point pour maintenir celle de l'âme.

Il est un âge où quelques mois ajoutés à la vie suffisent pour développer des facultés jusque alors ensevelies dans un cœur à demi fermé : on se couche enfant, on se réveille homme.
Si quelques heures font une grande différence dans le cœur de l'homme, faut-il s'en étonner ? il n'y a qu'une minute de la vie à la mort.

Il y a deux points de vue d'où la mort se montre bien différente. De l'un de ces points vous apercevez la mort au bout de la vie, comme un fantôme à l'extrémité d'une longue avenue : elle vous semble petite dans l'éloignement, mais à mesure que vous en approchez elle grandit ; le spectre démesuré finit par étendre sur vous ses mains froides et par vous étouffer.
De l'autre point de vue la mort paraît énorme au fond de la vie ; mais à mesure que vous marchez sur elle, elle diminue, et quand vous êtes au moment de la toucher, elle s'évanouit. L'insensé et le sage, le poltron et le brave, l'esprit impie et l'esprit religieux, l'homme de plaisir et l'homme de vertu, voient ainsi différemment la mort dans la perspective.

La voix de l'homme ne se ranime pas comme celle de l'écho : l'écho peut dormir dix siècles au fond d'un désert et répondre ensuite au voyageur qui l'interroge ; la tombe ne répond jamais.

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